Été 1938. Le travail se fait rare à Montréal. Émile saute sur l’occasion présentée par son frère Paul d’accompagner monsieur Rodrigue Dugas, inspecteur en apiculture. En sillonnant la Montérégie avec son nouveau mentor, il découvre un rucher à vendre dans le village de Lacolle.
« Il appartenait au curé de la paroisse qui venait de décéder, mais le bedeau avait peur des abeilles ! Il m’a offert les 50 ruches pour 500$ que j’ai dû emprunter à la banque. Les biscuits Viau ont été mes premiers clients. Je leur ai vendu mon miel au baril à 7€ la livre. J’en ai produit 5000 livres cette première année. »
La petite entreprise a continué de fleurir et d’essaimer! II acquiert les 100 ruches de Léon Daigneault à Longueuil ainsi que son caveau et un grand terrain, le tout pour 4000$. Il y construira plus tard sa maison, sur le chemin de Chambly face à l’actuel Cégep Édouard-Montpetit.
«Quand je me suis établi à Longueuil en 1940 ma mère me donnait un coup de main. Je revois la pancarte au bord du chemin : a Miel à vendre ». On le vendait 10¢ la livre. >>
Son rucher lui évite d’être mobilisé par l’armée canadienne pour la Seconde Guerre mondiale. Les hommes qui œuvrent dans l’agriculture sont jugés plus utiles sur leur terre qu’au front. Sa colonie continue de croître. Il possède maintenant 300 ruches et produit 30000 livres de miel par année.
Eté 1950. Après une mauvaise saison, il déménage son rucher au Lac-Saint-Jean. La température inclémente ajoutée à ses obligations à son restaurant le décide à y vendre son rucher. Ses abeilles, il en comptait deux millions à la fin, lui ont enseigné la vaillance et la patience.
« Les abeilles m’ont appris à travailler avec calme et précision sous la pression. Pas question de s’agiter en leur présence, sinon elles se retournent contre toi. Lors de moments cruciaux, je garde le même sang-froid.»